Pourquoi, malgré tous les machins à Responsabilité, les chocs en tout genre et les aumônes du gouvernement, je n'embaucherai pas
Je suis un chef d'entreprises, passées d'un effectif de 43 à 18 en un peu plus de 2 ans.
La crise est passée par là, et nous avons dû rationnaliser, nous restructurer, nous recentrer sur les activités rentables, licencier, et tenter de faire tenir l'esquif dans la tempête.
L'horibilis année 2012 a été l'année de la constatation d'énormes pertes, et de l'injection de capitaux des associés dans les sociétés, jusqu'à en vider les fonds de poches, et s'exposer aux banques auxquelles nous avions cautionné tous les emprunts et découverts. 2013 a constaté la chute du chiffre d'affaires, et une perte plus conenue, grâce aux efforts sur les coûts et les charges.
2014 sera équilibrée, et 2015 devrait être une année correcte.
Compte tenu du travail de fond, nous aurons un carnet de commande rempli pour les 12 prochains mois. Un exploit ! Un réconfort, un salut... Nous allons avoir beaucoup de mal à faire face à l'afflux de travail : des heures supplémentaires, de l'externalisation, de la hiérarchisation des tâches.
Mais nous n'embaucherons pas.
N'en déplaise à nos gouvernants, cela n'est pas possible.
Ni avec le CICE qui va nous conforter de 7 ou 10.000 €, ni avec le choc de simplifaction, ni avec le Pacte de responsabilité, ni avec les marques nouvelles d'amour de notre Président.
Et ce n'est pas la rancoeur, du reste légitime, qui nous dirige dans ce sens là.
Mais après avoir été stigmatisés (tant pis), taxés (tant pis) il aurait au moins fallu que l'on sache à quoi s'attendre.
Or, depuis deux ans et demi, nous ne savons pas comment seront traitées les affaires dans le mois ou le trimestre qui suit : des annonces de texte sans suite, ou avec des suites partielles, des lois passées, mais pas les décrets, ou des retours sur des textes votés.
Ca vaut pour l'entreprise comme pour les citoyens : nous ne savons qu'une chose, c'est que rien n'est stable.
Ce n'est pas d'aumône, dont nous avons besoin. C'est de savoir si la fiscalité, la législation seront stables, si nous pouvons vendre à nos clients en confiance. ET CE N'EST PAS LE CAS.
Qu'il faille baisser les charges (salariales, surtout, pour qu'au moins on paie en net correctement les salariés, qu'ils aient un intérêt au travail), qu'il faille drastiquement faciliter l'accès à lembauche et la formation en facilitant les ruptures, c'est absolument évident.
Car, je n'embaucherai pas puisque je ne sais pas garantir de travail plus de 6 ou 8 mois. Et que si je ne parviens pas à apporter du travail à l'entreprise et aux salariés, je serai le responsable de la rupture de travail que l'on me fera payer (financièrement et psychologiquement).
Je n'ai pas confiance dans ce gouvernement, dans ce parlement qui n'a pas de ligne directrice claire, et qui vote des amendements les 30 décembre pour l'exercice qui vient.
Qu'il prenne des mesures que je réprouve, je ferais avec. Mais qu'il prenne des mesures claires, qu'ils les appliquent et les assument.
Et qu'il arrête avec les pactes, les chocs, les crédits, les grandes formules : les entreprises n'ont besoin que de clarté, de stabilité et de confiance.
Je n'embaucherai pas. Je ne créerai pas plus de richesse, ni pour l'entreprise, ni pour la France. Je ne contribuerai pas à plus de construction. Parce que l'Etat n'assume pas son rôle primordial : créer un environnement de confiance.
Et au lieu de me morfondre et de me contenir, si cet environnement ne change pas, si un climat stable et confiant ne revient pas en France, alors sans doute irais-je moi aussi en chercher un autre ailleurs.
Et je n'y réclamerais aucune aumône, aucun Pacte ou choc : juste du bon sens et de la confiance.